Connaissez-vous le niébé ? Glim Africa a mis cette légumineuse à l’honneur de sa gamme de pâtes. Celles-ci se déclinent en trois recettes : nature, au gingembre et au curcuma. Sans gluten, arborant un Nutri-Score A et avec un ingrédient d’origine africaine : un renouveau dans le monde des pâtes ! Nous sommes allés à la rencontre d’Annie Adiogo, entrepreneuse et fondatrice de Glim Africa : un échange riche d’un point de vue nutritionnel et bien sûr culturel.
En quelques mots, pouvez-vous vous présenter ?
Je m’appelle Annie Adiogo, j’ai 30 ans et je suis fondatrice de Glim Africa. J’ai fait des études dans l’agroalimentaire et j’ai eu deux expériences principales professionnelles dans l’agroalimentaire en tant que manager chez Ducros puis chez les chocolats Poulain. J’avais cependant du mal à trouver du sens à mon travail qui était très opérationnel. Cela m’a donné envie de monter un projet cher à mon cœur et de relever les nombreux défis du Cameroun, mon pays d’origine.
Comment a débuté la belle aventure de Glim Africa ?
Fin 2017, je suis donc partie au Cameroun étudier l’écosystème et notamment une sélection de différentes graines cultivées là-bas. J’ai eu la chance quelques mois plus tard d’intégrer un mastère spécialisé en Ingénierie de Produits à l’interface Cuisine-Industrie à AgroParisTech pour approfondir mes connaissances R&D et être accompagnée dans mon projet. J’ai donc réalisé mon stage sur mon projet de fabrication de pâtes alimentaires à partir de graines de niébé. Glim Africa est né officiellement en juillet 2020. Elle vise à proposer une nouvelle façon de consommer les ressources agricoles africaines en valorisant l’intérêt nutritionnel de ces produits !
Je ne suis pas seule dans ce projet, je travaille avec un chef cuisinier Christian Abegan : engagé depuis plus de 30 ans dans la promotion de la gastronomie africaine.
En quoi Glim Africa répond à des problématiques essentielles et également à la grande tendance actuelle du sans gluten ?
Pour être honnête avec vous, c’est la dynamique importante qu’il y eu dans le lancement de nouveaux produits sans gluten en France, qui m’a inspirée. Cette recherche d’alternatives m’a rappelé qu’au Cameroun, on importe énormément de blé. Que ce soit d’un point de vue écologique et économique, ce n’est pas l’idéal. Beaucoup de produits transformés sont en effet importés mais on en oublie de valoriser la production locale. J’ai donc cherché un moyen de lutter contre ce phénomène, dans une logique de valorisation de notre territoire mais aussi d’autosuffisance alimentaire.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur le niébé ?
Le niébé est une variété de légumineuses cultivée dans la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique Centrale. On la connaît aussi sous le nom de cornille ou de Black-Eyed-Peas. (Oui, qui a inspiré le nom du célèbre groupe de musique !) Le niébé est une graine majeure dans l’alimentation de ces pays. Il est aussi cultivé au Cameroun et consommé principalement dans un plat : le koki qui est une terrine épicée faite à partir de graines de niébé. Il est également utilisé pour faire des beignets !
D’un point de vue nutritionnel, il est extrêmement riche car source de protéines avec une teneur de 22%. Il contient également des fortes teneurs en fibres, en potassium et en fer.[1] Et il est évidemment sans gluten.
Du côté cultural, comme c’est une légumineuse, c’est une culture bénéfique pour les sols. Il est capable de fixer l’azote des sols et ainsi stimuler la rotation des cultures en limitant l’utilisation d’intrants azotés.
Enfin, il fait partie des 50 aliments futurs selon le Rapport Planète durable publié en 2019 par la WWF.
Pour vous, c’est quoi la Food Identité Africaine ?
Les pâtes ne sont pas culturellement un produit d’Afrique mais je voulais montrer qu’il est possible de se l’approprier avec nos propres ingrédients. J’aimerais donner cette dimension africaine à des aliments du quotidien. C’est une notion que j’aime promouvoir car la logique de mon projet est de s’inspirer des différents savoir-faire qui existent déjà, d’ouvrir les horizons et d’y apporter une touche africaine.
Quels sont les projets à plus ou moins long terme pour Glim Africa ?
Nos pâtes vont être commercialisées à partir de mars 2021 et nous avons choisi de les distribuer dans les épiceries et en e-commerce. Également, nous aimerions en faire profiter des distributeurs partenaires alignés sur les mêmes valeurs que nous.
A court terme, nous aimerions que Glim Africa se démarque par l’innovation en créant une gamme assez large de produits pour montrer ce potentiel derrière les ingrédients d’Afrique. L’objectif est d’ouvrir le champ à d’autres produits du quotidien, notamment avec la panification.
Sur le long terme, nous aimerions bien sûr pouvoir briller localement au Cameroun. Pour l’instant, il s’agit d’un marché spécialisé car c’est un produit tout nouveau. Mais nous avons la volonté de les vulgariser et de rentrer dans le quotidien des populations locales. Également, que des gens dans le monde entier aient envie de goûter ces pâtes !
Le mot de la fin ?
L’objectif de Glim Africa, ce n’est pas seulement de faire des produits, mais c’est aussi d’accompagner les gens avec des recettes qui valorisent le continent. Cette démarche d’accompagnement est primordiale pour nous, en proposant des recettes équilibrées tout en informant les populations. Nous aimerions aussi que Glim Africa soit à l’origine d’une émulation pour que d’autres projets puissent naître dans ce type de démarche.
Si vous désirez donner un coup de pouce à cette start-up au cœur de la transition alimentaire, rendez-vous sur leur campagne de crowdfunding disponible jusqu’au 31 janvier 2021.
[1] FAO 2016, année internationale des légumineuses
Un article écrit avec Pauline Moehlinger, assistante chef de projet. Merci à elle !
