La transition alimentaire revêt de nombreux aspects. Nous avons mis notre définition noir sur blanc. Même si, bien sûr il en existe d’autres. Pour nous, « La transition alimentaire est l’évolution de notre modèle alimentaire vers plus de respect de la santé humaine, de notre planète et du bien-être des animaux. Elle regroupe toutes les actions que mettent en place les acteurs de la filière alimentaire pour y parvenir : producteurs, transformateurs, distributeurs, restaurateurs, consommateurs ».
Le 3 février dernier, nous avons animé un webinar dédié à ce sujet. Plus particulièrement, mettant en lumière les nombreux visages qui illustrent le changement. Nous sommes partis à la rencontre de 4 acteurs qui œuvrent pour la santé et la durabilité. Comment travaillent-ils ? Quels résultats obtiennent-ils ? Quelle est leur vision du métier et de l’écosystème alimentaire ?
4 entreprises, 4 façons de contribuer à la transition alimentaire.
Lors du webinar, nous avons croisé les métiers et les points de vue de 4 acteurs du secteur.
Marie Kerouedan, Présidente co-fondatrice de Résurrection.
Son thème : la transition grâce à la création de valeur. Face au constat de la gestion des ressources, il est temps de proposer des solutions qui métamorphosent l’approvisionnement en matières 1e. Plutôt que de créer de nouveaux ingrédients pour ces recettes, le parti-pris de Résurrection est de valoriser un déchet pour en faire un ingrédient. D’où la naissance de Résurrection qui met l’upcycling à l’honneur.
Anne-Cathy de Taevernier, Directrice Nutrition Elior Group.
Anne-Cathy est intervenue sur le sujet de la transition par la transparence et la pédagogie autour de l’information nutritionnelle. Elle a ainsi pu mettre en lumière la mise en place du Nutri-Score en restauration collective. Cette initiative a vu le jour grâce au travail commun avec le Ministère de la Santé, pour adapter le Nutri-Score à la restauration et à l’utilisation sur des recettes.
Maximilien Nguyen, CEO d’Excellent.
Maximilien a pris la parole sur le sujet de la transition végétale & clean. La nécessité de consommer moins de ressources animales est avérée. Mais maintenant, il s’agit de proposer des alternatives clean. Tous les aliments transformés ne se ressemblent pas. Ils peuvent revêtir une réelle utilité, favoriser la durabilité et la santé avec des recettes courtes. En somme, il s’agit de basculer vers une alimentation plus végétale sans les inconvénients. Quitte à passer sur le végétal, il faut que ce soit bon pour la santé (bio, sans additifs, clean food).
Bernard Barlet, Co-Fondateur de Basal Nutrition.
Bernard a pris la parole sur le sujet de la transition vers la santé, à la frontière entre aliments et médicaments. L’équipe Basal Nutrition travaille sur des enjeux forts en lien avec la transition que nous vivons :
- L’idée d’apporter du mieux-être et un rôle préventif plus fort grâce à notre alimentation. Tentons de revenir à des fondamentaux : assiette + activité physique + micronutrition.
- L’importance de mettre en œuvre des matières 1e de qualité (protéines végétales, probiotiques) pour entrer dans un cercle vertueux qui aiderait à préserver les ressources en eau et à protéger les insectes polinisateurs.
Ce que nos intervenants pensent de la transition alimentaire en 4 questions.
Quelle place pour l’hédonisme, face à l’importance de la santé et de la durabilité ?
L’enjeu de nourrir 10 milliards de personnes de façon saine et durable transparait dans chacune des démarches illustrées dans ce webinar. Mais qu’en est-il de la notion d’hédonisme ? Comment mettre en avant la santé et la durabilité, sans oublier l’un des rôles premiers de l’alimentation, à savoir le plaisir ?
Maximilien a évoqué le fait que l’on ne peut pas demander aux mangeurs de basculer vers du végétal en leur imposant trop de contraintes, y compris celle du goût. Travailler sur des simili carne bons au goût est au centre de la démarche d’Excellent.
Anne-Cathy a expliqué que la démarche d’Elior est justement de privilégier le goût, indispensable quand on est acteur de la restauration collective et sociale. Par exemple, en diminuant le grammage des protéines animales, sans les supprimer ; en ne substituant pas toutes les recettes en végétal mais plutôt en travaillant avec des Chefs sur des recettes gourmandes, des épices, des associations avec des légumineuses…
Quant à Marie, la raison d’être de Résurrection est d’être un produit plaisir. En plus de la durabilité bien sûr ! Sain, durable et gourmand sont trois notions qui sont loin d’être contradictoires. La gourmandise, pour continuer à exister sans détruire nos écosystèmes et nos santés, se doit nécessairement d’être durable. Mais le durable peut avoir très bon goût, et rejoindre la notion de plaisir.
Et enfin, pour Bernard, il faut justement sortir de cet état d’esprit orthorexique dans lequel nous nous enfermons. Autrement dit, quand l’aliment devient problématique. Cela vient troubler la dimension sociale de l’alimentation, très forte en France. C’est une chance, saisissons-la !
Quel rôle joue le Nutri-Score dans la Transition Alimentaire ?
C’est bien sûr Anne-Cathy, d’Elior Group, qui a le plus de recul sur le sujet. Si la transparence de l’information nutritionnelle est une demande de la loi Egalim, la pédagogie apportée par le Nutr-Score porte déjà ses fruits :
- En milieu scolaire, 93% des enfants souhaitent que le Nutri-Score perdure.
- 64% sont rassurés sur la qualité nutritionnelle des repas servis grâce au Nutri-Score.
Bernard de Basal Nutrition évoque la pertinence du Nutri-Score mais il met également en garde contre le « tout nutriment » : le Nutri-Score apporte une information nutritionnelle mais ne tient pas compte des autres dimensions de l’alimentation que sont la durabilité ou le goût. Ce n’est pas un reproche fait à cet outil mais plutôt une vision holistique de l’alimentation qu’il faut conserver.
La question autour du Nutri-Score pourrait être : ne doit-il pas devenir un pré-requis, pour pouvoir se concentrer ensuite sur d’autres qualités intrinsèques d’un aliment telles que la provenance de ses matières 1e, la présence ou non d’additifs, etc.
Comment avoir un impact de masse ?
La transition est en marche. Mais… Comment avoir un réel impact, auprès du plus grand nombre ? Pour agir à l’échelle la plus large possible : au niveau produit/recette, au niveau des enjeux demandés par l’Etat, au niveau de la communication et de la pédagogie.
Maximilien et Anne-Cathy ont mis en avant le rôle joué par la restauration collective sur ce sujet. Les collectivités sont certes contraintes par la loi Egalim, pour la qualité nutritionnelle et pour apporter des solutions végétales.
A l’arrivée, le résultat est là : une entreprise comme Excellent permet de résoudre la quadrature du cercle du végétal qui demande de mixer la question du prix, de la nutrition, du non gaspillage…
Du côté d’Elior, travailler des recettes savoureuses est l’une des façons de lutter contre le gaspillage : ce qui est bon est mangé et pas jeté !
Enfin, comment rendre la nutrition intelligible ?
Qui sont les consommateurs réceptifs aux nouveaux produits ? Ne touche-t-on pas qu’une population élitiste avec des produits techniques ? Comment rendre intelligible des notions complexes, comme l’upcycling ou encore la qualité des probiotiques pour le consommateur ?
Marie a expliqué que la valeur créée dans le produit doit se retrouver dans le discours : convaincre que des matières 1e upcyclée peuvent aboutir à des aliments de qualité sur le plan nutritionnel et gustatif. L’upcycling ne peut exister seul, c’est une nécessité pour éviter l’épuisement de nos ressources, mais cela doit amener du mieux à tous les niveaux !
Bernard a mis en avant ceci : Qu’est-ce que le consommateur comprend, que vient-il acheter dans tel ou tel point de vente ? Il y a, d’un côté, une partie de la population qui est en précarité alimentaire. Sa motivation n°1 n’est pas de comprendre mais de manger. Et il y a, de l’autre côté, 15% de la population prête à comprendre une étiquette, comprendre des produits complexes. Il faut presque avoir un background de nutrition ! Pour certains produits, il faut quasiment un conseiller pour choisir un produit. Dans ce cas, le choix du circuit de vente est crucial. Il faut trouver la bonne écoute, le bon message.