Pour cette nouvelle édition du 10 février 2023, le Think Tank Food & Planet s’est penché sur la thématique du « Comment mieux produire ? ». Après avoir traité au cours des éditions précédentes des sujets de la durabilité de l’alimentation et de la transformation des habitudes alimentaires, les réflexions de cette nouvelle édition se sont portées sur l’amont de la chaine de valeur. Une demi-journée d’échanges et de réflexions autour d’un enjeu commun : mieux produire en préservant nos sols et nos ressources, au service du mieux manger.
Des experts réunis pour échanger sur le « mieux produire »
L’édition de février 2023 du Think Tank Food & Planet s’est tenue entre les murs de l’Assemblée nationale et s’est déroulée en 2 parties.
La matinée a débuté avec une table ronde, animée par Philippe LEGUELTEL, regroupant 6 experts du domaine :
- Stéphane TRAVERT – Ancien ministre de l’Agriculture, député de la Manche et membre de la commission des affaires économiques
- Pascal LAVERGNE – Député de Gironde et membre de la commission des affaires économiques
- Alexis DEGOUY – Directeur général d’Interfel et du CTIFL (Centre Technique Interprofessionnel des Fruits et Légumes)
- Michel BIERO – Directeur exécutif des Achats et du Marketing chez Lidl France
- Quitterie DAIRE-GONZALEZ – Directrice des affaires publiques chez Syngenta
- Raphaël MASVIGNER – Co-fondateur de Circul’R
Et elle s’est poursuivie par la présentation de 3 start-ups :
- Theresa Technics. Son président Arnoud TIELMAN a eu l’occasion de présenter la Theresa Greenhouse™, une serre horticole nouvelle génération, à très basse empreinte énergétique.
- Biomede. Manon PONCATO, venue présenter cette start-up basée à Lyon, qui travaille sur la phytoremédiation : l’extraction, par les plantes, des métaux lourds des sols agricoles.
- Circul’Egg. Représentée par son fondateur, Yacine KABECH, cette start-up portée sur l’upcycling, a pour vocation de transformer et valoriser les coproduits industriels, à commencer par les coquilles d’œufs.
Think Tank Food & Planet : enjeux et solutions pour mieux produire
Dans le contexte économique et environnemental que nous connaissons actuellement, la problématique du « mieux produire » est forte. Comment produire plus, et surtout comment produire mieux ? C’est le sujet sur lequel s’est porté le débat de cette matinée de Think Tank Food & Planet. La liste des enjeux à faire concilier est longue :
- Souveraineté alimentaire
- Compétitivité et lutte contre la concurrence déloyale
- Partage équitable de la valeur au long de la chaîne de production
- Bien-être et juste rémunération des agriculteurs
- Préservation de l’eau
- Protection des sols
Sans en dresser une liste exhaustive, voici quelques solutions abordées au cours des échanges de la table ronde de ce Think Tank Food & Planet.
Travailler sur la structuration de nos modèles agricoles et de nos filières
Agroécologie, agriculture raisonnée, agriculture régénérative, autant de façons de repenser nos modèles agricoles en faveur d’une agriculture plus durable. L’agriculture régénérative a démontré son rôle dans le mieux produire. Le non labour, le couvert végétal permanent et la vigilance à la bonne santé des plantes, ont par exemple été cités parmi les techniques permettant d’obtenir de bons rendements, tout en protégeant nos ressources. Dans la même optique, les outils d’aide à la décision et l’agriculture de précision qui posent les fondements de l’agriculture raisonnée ont été mentionnés.
Au-delà de nos modèles agricoles, c’est également notre modèle économique qui mériterait d’être repensé. Parviendra-t-on à opérer notre transition vers un modèle d’économie circulaire afin de limiter le gaspillage et revaloriser les coproduits issus de nos systèmes ? La question reste entière.
Accompagner les agriculteurs
Comment ne pas parler des agriculteurs au cours de ce Think Tank Food & Planet sur le mieux produire ? Plusieurs sujets ont été évoqués concernant l’amélioration de leur accompagnement :
- Revaloriser le travail des agriculteurs en veillant à une meilleure répartition de la valeur sur la chaîne de production.
- Donner aux agriculteurs les moyens d’investir dans la durabilité de leur exploitation.
- Leur faire davantage confiance et croire en leur volonté de faire ce qui est en leur pouvoir pour produire en faveur d’une alimentation durable et de qualité.
Tout cela permettrait de donner plus de valeur au métier, de lui faire regagner en attractivité et ainsi de limiter la perte de compétences causée par la désertion des exploitations agricoles qui s’opère en France.
Mobiliser la recherche et l’innovation
Les pistes d’innovation sont nombreuses dans le secteur agricole : machinisme, biotechnologies, solutions phytosanitaires et de biocontrôle… Des axes de recherche qui permettraient d’améliorer les conditions de production grâce à une meilleure maîtrise de l’environnement ou des techniques de cultures par exemple.
Un autre levier abordé au cours de ce Think Tank Food & Planet : le travail de sélection variétale. En plus de l’amélioration des conditions de production, optimisons aussi l’efficacité de nos cultures, en développant des variétés plus efficaces dans leur utilisation des ressources (eau, engrais…). Autrement dit, apprenons à produire plus en consommant moins. Au cours des échanges, les intervenants ont également parlé de phytoremédiation. L’art de régénérer les sols à l’aide des plantes et ainsi de veiller au respect de leur équilibre agronomique.
La recherche et l’innovation sont unanimement apparues comme l’une des solutions clés au mieux produire. Mais pour qu’elles portent leurs fruits, les intervenants de ce Think Tank Food & Planet ont insisté sur l’importance de :
- Leur octroyer les moyens financiers et humains dont elle a besoin pour avancer efficacement
- Leur laisser le temps : en agronomie, la recherche avance au rythme des cycles végétatifs. Depuis le lancement du projet de recherche jusqu’à l’autorisation de mise sur le marché d’une solution efficace, plusieurs années peuvent donc s’écouler. Patience et longueur de temps…
- Mettre en place une réglementation favorable à l’innovation.
Ouvrons une parenthèse sur la question de la réglementation, en prenant l’exemple de l’interdiction de l’utilisation des néonicotinoïdes. Un exemple d’actualité illustrant l’incohérence que peut créer l’avancement à deux vitesses de la recherche et de la réglementation.
L’interdiction, en France, de cet insecticide a été décidée en faveur de l’environnement et de la biodiversité, pour lutter contre le déclin de la population d’abeilles. Une bonne nouvelle donc aux yeux du grand public. Mais dans les faits, c’est un coup de massue pour les agriculteurs français et plus particulièrement pour les betteraviers. A date, des solutions de substitution sont en cours d’étude mais aucune n’est à un stade de recherche assez avancé pour servir d’alternative. Les betteraviers se retrouvent donc impuissants face à la perte de leurs récoltes, alors qu’en parallèle, nous continuons d’importer des produits, traités aux néonicotinoïdes, venant d’autres pays. Certains dénoncent la concurrence déloyale que cette situation provoque, et le risque d’effondrement des filières françaises…
Accompagner les consommateurs
Quatrième et dernier levier abordé au cours de ce Think Tank Food & Planet : la sensibilisation du grand public sur sa façon de consommer.
A l’interface entre le monde agricole et les consommateurs, les distributeurs sont des acteurs clés. C’est à eux d’engager la discussion avec les agriculteurs et de leur proposer des solutions de soutien (contrats tripartites…). Les distributeurs sont également garants du juste prix : attention à ne pas se laisser entrainer dans une guerre de prix qui pourrait se répercuter sur le monde agricole. Enfin, ils jouent un rôle majeur dans l’éducation des consommateurs sur le prix des produits agricole. Pourquoi refuser de payer un euro son litre de lait lorsque payer trois euros pour une bouteille de soda semble tout à fait acceptable ? Ce sera le sujet d’un prochain Think Tank Food & Planet !
Des solutions à mettre en place donc tout au long de la chaine pour avoir un véritable impact : depuis la semence jusqu’à l’assiette. Il parait ainsi évident qu’il est nécessaire de continuer à débattre ensemble de façon constructive et d’avancer ensemble vers des solutions pour mieux produire, en faveur du mieux manger.
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